Un rythme de travail élastique, une cellule familiale affaiblie viennent renforcer une société de plus en plus individualiste.
Et pourtant, les outils modernes pour communiquer entre nous sont légions : les téléphones mobiles, les réseaux sociaux, les applications, l’internet. Tout ces moyens devraient contribuer à faciliter nos échanges et nous rapprocher les uns des autres pour bien nous comprendre.
Pour autant, il semblerait que ces connexions multiples n’aient pas que des conséquences positives sur nos relations interpersonnelles : les tensions ou conflits sont toujours bien présents, quel que soit l’environnement : Professionnel, familial, voisinage, …
Les prétextes pour ne pas s’entendre sont multiples : Envie d’avoir raison, déni, souffrance, impatience. Les ingrédients sont là pour qu’un quiproquo ou une différence de vue se transforment au fil du temps en conflits ouverts ou tensions latentes.
Bien souvent, face aux désaccords, la fuite domine : « On est brouillé », « il ne me parle plus », « je ne peux pas travailler avec elle ». Les situations bloquées peuvent ainsi s’enraciner pendant des années, faisant fi de la souffrance de chacune des parties.
L’autre moyen d’affronter le conflit est de le transformer en combat : « Il faut voir avec mon avocat », « le juge me donnera raison ». Peu importe les conséquences, l’important est que l’autre perde.
Une troisième voie pointe le bout de son nez en France : La médiation, comme un Mode Alternatif de Règlement des Différends (MARD), est apparue pour la première fois en 1995 puis s’est progressivement imposée dans les textes en 2012, 2015, 2020.
Elle n’est pas encore devenue un réflexe pour nos concitoyens, contrairement à nos voisins, suisses ou québécois qui l’utilisent en première intention.
Alors, en 2021, quelles sont les dix raisons susceptibles de vous faire choisir la médiation ?
1/ La confidentialité des échanges
C’est le fondement même de la médiation : Les parties en conflit et le médiateur font le choix de ne rien dévoiler de ce qui est dit en séances. C’est la confiance dans cette règle qui permet de se dire les choses en toute liberté.
Pour les entreprises, c’est une donnée primordiale pour des raisons commerciales bien compréhensibles. Alors qu’un jugement est public, une médiation permet de trouver des accords sans que les autres clients ou fournisseurs n’en soient informés.
2/ La sauvegarde du lien
Bien entendu, rien d’obligatoire à vouloir garder un lien avec l’autre partie. Lors d’une séparation, la médiation peut tout à fait acter une rupture sans autre finalité que celle-ci.
Lorsque des enfants sont présents, l’enjeu de maintenir le lien entre les parents s’avère une donnée essentielle pour la suite : Il est important de ne pas être totalement brouillé puisque les échanges autour des enfants (garde, scolarité, éducation, sport) vont continuer à exister par-delà la séparation.
Le fait de se dire les choses, d’entendre les besoins de chacun, d’imaginer ou inventer des solutions ensemble permet d’envisager le quotidien plus sereinement.
Pour les entreprises, il peut permettre de repartir sur des relations commerciales assainies ou un partenariat renforcé.
3/ Le recours à sa propre responsabilité
Il est peut-être plus confortable de remettre des sujets difficiles entre les mains d’un avocat. La plainte et le tribunal sont ainsi des moyens pour ne pas affronter l’autre directement. Dans certains cas, c’est aussi une protection qui peut tout simplement permettre de continuer à vivre.
Bien souvent cependant, les enjeux et les risques ne sont pas si importants. La médiation permet alors aux protagonistes de s’expliquer, de vider leurs sacs et de trouver eux-mêmes leurs propres solutions.
Les parties en conflit prennent donc la responsabilité de régler elles-mêmes leurs différends.
4/ La robustesse des solutions
Puisque les acteurs sont à la manœuvre pour trouver des solutions satisfaisantes, la mise en application est beaucoup plus sûre. Chacune des parties ayant trouvé une issue qui répond à ses besoins fondamentaux, il devient plus facile de jouer le jeu et faire les efforts nécessaires à la bonne mise en œuvre des propositions.
Au contraire d’une décision arbitraire (prise par un professionnel de l’arbitrage ou un juge) qui verra bien souvent une partie se sentir lésée par rapport à l’autre.
5/ La rapidité de la mise en action
On dit souvent que la durée (ou le temps) profite toujours au conflit. Dans le cas d’une plainte, un certain nombre de mois, d’années se passent entre l’enregistrement de la plainte et la décision du juge. On peut supposer que cette période, faite de ressentiments, de colère, d’inquiétudes, ne va pas participer à améliorer les relations.
La médiation peut être mise en route très rapidement (dès que les deux parties sont consentantes) et en quelques séances les problèmes peuvent se régler.
6/ La bienveillance et l’empathie
Le médiateur s’engage à vous accueillir tel que vous êtes, sans jugement. Il ne connait pas l’historique de votre histoire et de votre conflit. Il va donc vous demander de relater votre point de vue, la façon dont vous vivez les tensions, ce que vous ressentez, ce dont vous avez le plus besoin.
Contrairement à une action en justice où l’avocat de la partie adverse peut émettre des avis sur votre façon de faire ou vos habitudes de vie, la médiation est un endroit où l’on s’écoute avec bienveillance sans juger.
7/ La clarté sur le déroulement
Une convention signée par les trois parties en présence vient fixer le cadre de l’intervention. Le nombre des séances, leur durée, le lieu et les dates de rendez-vous sont connus de tous.
Qui peut dire en revanche comment va se dérouler une procédure en cours ? Les magistrats eux-mêmes ne peuvent apporter cette information.
8/ Le moindre coût pour les deux parties
Une médiation peut se faire en présence des avocats de chacune des parties. Ils défendent les intérêts de leur client tout en apportant des conseils sur la faisabilité ou la légalité de telle ou telle mesure envisagée. Le coût de la médiation est donc en rapport avec les heures de présence des professionnels autour de la table.
En l’absence d’avocat, seul le médiateur est rémunéré. La note est donc beaucoup moins salée et souvent partagée à parts égales.
Dans tous les cas, pas de surprise puisque le coût du ou des intervenants (en cas de médiation de groupes) est prévu dans la convention préalablement signée.
9/ L’oral avant les écrits
Les mots peuvent blesser mais lorsqu’ils sont écrits, ils restent.
Peu d’écrits en médiation (sauf accord final) et beaucoup d’échanges. Si les mots peuvent dépasser notre pensée, ils peuvent être revisités au gré de l’avancée des discussions : Le « con » du début de séance peut finalement devenir un allié pour coconstruire une solution.
Ici, pas de témoignages de connaissances ou d’amis versés aux dossiers permettant à chacun de fourbir ses armes. On sait que les écrits peuvent alimenter le feu car les mots utilisés sont maladroits, ambigus, mais surtout : ils restent.
10/ L’expérience formatrice
La Communication NonViolente (CNV) selon M. Rosenberg peut être assimilée à une façon d’appréhender le monde, de voir la vie différemment. Ce mode de communication n’est pas aisé à mettre en application mais il est source de beaucoup d’évolutions positives pour celui ou celle qui voudrait s’y intéresser.
Le médiateur CNV facilite les échanges en utilisant les étapes décrites par Marshall Rosenberg. Ainsi, l’expérimentation en séances d’une communication différente et apaisante peut montrer aux acteurs qu’il est possible de se connecter aux autres différemment et donc, pourquoi pas, d’adopter cette pratique.
Voici donc les dix raisons qui pourraient demain vous faire choisir la voie de la médiation.
J’ai l’espoir que pour toutes ces raisons, cette voie amiable du traitement des conflits devienne le principe et le procès, l’exception.
Frédéric Font,
S’écouter pour mieux s’entendre